« Tel fût le décor insolite de l’ancêtre des parlements Occidentaux.  Il était à l’échelle d’un peuple travaillé d’espace et de liberté. Des amas de blocs tenaient lieu de tribunes ; des éboulis et des gazons servaient de sièges à l’assemblée ; les murailles étaient d’horizons, le plafond peint et repeint inlassablement de ciel, de soleil ou de nuages par le grand dieu Thór en personne. L’inauguration eu lieu en 930. Les grands sites historiques comme Thingvellir ont des portes invisibles que les foules ne franchissent jamais. Du moins certaines foules. Nul n’en retrouve les clefs s’il ne participe. » (p.51)
Carte ancienne d'Islande (XVIème siècle)
Carte ancienne d'Islande (XVIème siècle)
Parc nationa de Þingvellir
Parc nationa de Þingvellir
Îles Vestmann
Îles Vestmann
60 ans plus tard en Islande, c’est Jurassic Park, à l’exception qu’on ne réalise pas arriver dans un parc d’attraction géant. C’est un pays de 300,000 habitants qui sont très conscients de la beauté de leur patrimoine. Ils savaient que le tourisme de masse arriverait un jour ou l’autre et ils furent très intelligents dans leur manière de le préserver ou de le monétiser. Ils ont méticuleusement sélectionné quelques activités qui apparaissent sur les guides de tourismes et ils ont habilement tracé la « Ring Road », l’autoroute circulaire autour de l’île qui aborde ces lieux désignés, équipés de cantines et de magasins souvenirs.
Skógafoss (1962)
Skógafoss (1962)
Skógafoss (2022)
Skógafoss (2022)
Parc nationa de Þingvellir (1962)
Parc nationa de Þingvellir (1962)
Parc nationa de Þingvellir (2022)
Parc nationa de Þingvellir (2022)
Le « Triangle d’Or » en est l’attraction phare, reliant la fosse tectonique entre les plaques Eurasiatique et Nord-Américaine, le Geyser, et les chutes de Gullfoss. Ces trois endroits ne sont plus que l’ombre de leurs légendes, occupés par les dizaines de bus de tourisme et les centaines de gens qui s’amassent le long des parcours délimités par des barrières. Samivel était là il y a 60 ans, seul et libre de mouvement, contrastant avec la frénésie qu’occupe aujourd’hui ces lieux pris d’assaut par le tourisme. C’est là que les Islandais les contiennent, les masses. Sur une proportion minime du territoire, afin de laisser tout le reste immaculé, presque secret.
Geyser (1962)
Geyser (1962)
Geyser (2022)
Geyser (2022)
Cascade de Gullfoss (1962)
Cascade de Gullfoss (1962)
Cascade de Gullfoss (2022)
Cascade de Gullfoss (2022)
« Il y a une Géographie que tout le monde connaît, ou devrait connaître, celle qu’on enseigne dans les écoles, qui répond exactement à son étymologie, c’est-à-dire qu’elle est une description de la terre. Mais comme la Terre elle-même prend la figure que lui donne les hommes, c’est-à-dire suivant les temps, les lieux, toutes sortes de figures variées qui ne peuvent se confondre, il a fallu inventer presque autant de géographies que d’activités. » (p.11)
Port des Îles Vestmann (1962)
Port des Îles Vestmann (1962)
Port des Îles Vestmann (2022)
Port des Îles Vestmann (2022)
Port de Siglufjördur (1962)
Port de Siglufjördur (1962)
Port des Îles Vestmann (2022)
Port des Îles Vestmann (2022)
Sur les traces de Samivel, on vit la dualité des changements en Islande, entre l’industrialisation la métamorphose des paysages. Le port des îles Vestmann en est un exemple frappant. Jadis petit port de pêche en construction dans un lieu que Samivel décrivait comme secret et mystique, c’est aujourd’hui une opération de pêche industrielle majeure pour le pays avec toutes les infrastructures et senteurs associées. Les petits bateaux et coques en bois ont laissé place aux chalutiers géants, l’aérodrome a été complété par un nouvel aéroport international, Reykjavik a grandi, en haut et en large. Et derrière nous, les traces que nous laissons, les épaves du passé. Et entre nous, les lignes qui nous alimentent, thermiques au sol, électriques dans les airs. C’est comme le petit bateau jaune encerclant le rocher en toute insouciance, laissant dans son sillage une boucle d’écume telle un nœud que l’Homme resserre chaque jour.
Port de Stöovarfjörour (2022)
Port de Stöovarfjörour (2022)
Épave près de Stykkishólmur (2022
Épave près de Stykkishólmur (2022
« D’abord ils se partagèrent le sol. Ou plus précisément les premiers arrivants s’emparèrent des meilleurs lots, forçant ainsi les nouveaux venus à élargir peu à peu le champ des investigations… » (p.47)
Reykjavík (1962)
Reykjavík (1962)
Reykjavík (2022)
Reykjavík (2022)
Reykjavík (2022)
Reykjavík (2022)
« Les gels et les famines sont dépassés, les icebergs suivent d’autres routes […] Le soleil brille de nombreux jours et l’Islandais a fait fortune avec le poisson. Il a des maisons solides, des armées de moutons, une grande flotte. Il a aussi un compte en banque, des autos, des avions, des assurances, des journaux, des radios, des frigidaires… enfin ce qu’il faut pour marcher dans le siècle. » (p.90)
Aérodrome de Reykjavík (1962)
Aérodrome de Reykjavík (1962)
Aérodrome de Reykjavík (2022)
Aérodrome de Reykjavík (2022)
Université de Reykjavik (1962)
Université de Reykjavik (1962)
Université de Reykjavik (2022)
Université de Reykjavik (2022)
Nous avons toujours pensé la croissance telle une courbe ascendante, vertueuse et sans limite. En réalité, n’est-elle pas la mesure de l’accélération vers notre échec ? Peut-être que c'est "l'histoire d'un Homme qui tombe d'un immeuble de 50 étages, et qui,  au fur et à mesure de sa chute, se répète sans cesse pour se rassurer 'jusqu’ici, tout va bien.'"  
Usine géothermique de Námafjall
Usine géothermique de Námafjall
Lignes à haute tension près de Sandvátn
Lignes à haute tension près de Sandvátn
« À part deux ou trois exceptions rarissimes comme l’Égypte, le Mexique ou les Indes, les décors plantés par les hommes partagent avec un décalage plus ou moins brefs le sort des générations qui les ont édifiés. Par contre les mises en scène de la nature jouissent d’une immortalité relative. » (p.43)

You may also like

Back to Top